jeudi 24 février 2011

Born To Rock

1975 est une année-charnière pour Bruce Springsteen: il doit confirmer les espoirs placés en lui, qu'ils viennent de la critique ou du public. Et c'est chose faite avec "Born To Run", un album à la texture résolument rock et aux arrangements méticuleux. Mais c'est surtout sur le talent de conteur de la grouille urbaine que The Boss (comme il sera surnommé) ne déçoit pas. Il réinjecte ce don d'expression déjà présent, faut-il le rappeler, dans ses deux premiers albums mais au contraire de lisser le trait, y ajoute du relief, et magnifie l'orchestration avec beaucoup d'audace, du saxophone vaporeux de "Meeting Across The River" au lyrisme du piano, omniprésent sur l'album mais sans surcharge aucune. L'album peut réussir le pari d'être extrêmement populaire et adoubé par la critique comme, plus qu'un chef d'oeuvre, un pas marquant dans l'Histoire du rock.

vendredi 11 février 2011

Haro sur les ondes/"Here's the guys in the band"

Avec à son bord l'impressionnant gratteux Joe Walsh (qui s'illustrera au sein des Eagles), le James Gang était paré. Il avait néanmoins un handicap de taille: sans Walsh, qui possédait un relatif talent d'écriture (ce n'était pas Bob Dylan, mais on ne le lui demandait pas), les autres membres du groupe (Dale Peters et Jim Fox) bien que bons musiciens, s'en tenaient à ça. Par conséquent, et en dépit de ses efforts pour perçer et de compliments arrachés au guitariste des Who (Pete Townshend) envers son homologue américain (Walsh, si vous suivez toujours...) à qui il offrira même une de ses précieuses guitares, il n'aura jamais été plus qu'un ersatz de Cream, trio qui possédait trois pointures dans leurs instruments respectifs avec à leur crédit une forte personnalité pour chacun. On retiendra le meilleur album (et de loin) du gang de James, "Rides Again". Celui-ci est inégal. De celui-ci je vous recommande "Funk #49" (ma favorite, mais ça peut se discuter...)

mardi 8 février 2011

Vol au dessus d'un nid d'aigles

Ils étaient le backing-band de Linda Rondstadt, ils devinrent, avec sa bénédiction et sous le nom Eagles, le plus réputé des groupes de soft-rock, genre qu'un seul album avait contribué à définir, à savoir "Harvest" de Neil Young. Mais il faut reconnaitre qu'ils ne manquent pas de savoir-faire. Au contraire, il faut entendre la guitare de Joe Walsh tour à tour miauler et hurler sur la chanson "Hotel California" pour s'en persuader. Ils vont passer d'un country-rock somme toute assez potable (leur 1er album éponyme) à une orientation (suite au départ fracassant de Bernie Leadon) beaucoup plus rock, allant même jusqu'à des accointances avec le hard ("Life In The Fast Lane", morceau de bravoure sur leur "masterpiece" Hotel California). A force de rééditer constamment la formule, ils s'enfermeront dans les clichés inhérents au genre, entraînant changements de line-up et split. Leur reformation ne fera qu'accroître le sentiment qu'ils ont tout dit avec Hotel California. Pour rendre justice aux 8 mois (temps-record) qu'il leur a fallu pour écrire et enregistrer celui-ci, je vous convie à écouter l'album du début à la fin.

Neil, Steve & the others...

Premier vrai groupe de Neil Young et de Stephen Stills (ils se retrouveront dans le supergroupe CSN&Y), le quintet de Buffalo Springfield, pour plus que moitié canadien, se voit gratifié de toutes sortes d'éloges (amplement méritées) et courtisé par Ahmet Ertegun (patron d'Atlantic), qui croit très fort en leur potentiel. Leur premier album ne décevra pas l'estime portée à leur endroit, et est émaillé de ballades portées par des harmonies sublimes et un grand sens mélodique. Il y a quelque chose d'indéfinissable qui surnage de ce petit bijou. En tous cas on se sent très vite à l'aise, en pilote automatique sans que le contenu puisse être assimilé à des mièvreries sans intérêt. Mais il faut comprendre le contexte: un peu plus tôt ont lieu des révoltes estudiantines, en hommage desquelles ils gravent le superbe "For What It's Worth" avec son premier couplet mythique. Logiquement le morceau deviendra l'hymne de ces percées militantistes dans une Amérique en pleine mutation sociale. Revenons au contenu de l'album. Des morceaux courts, parfaits pour passer en radio et qui, de fait, sont tous très accrocheurs. Pour moi, cet album reste un enchantement et je gage qu'il le reste pour ceux qui étaient adolescents quand il est sorti. A conseiller si vous ne pouvez ou ne souhaitez pas vous procurer l'album entier: "Hot Dusty Roads".

With God by his side

Marvin Gaye a cette voix qui implore, gémit, convoque les désirs (sexuels, pour ce qu'on peut en juger) d'une civilisation jadis scindée en deux camps: les blancs et les noirs. C'est qu'il sait ce dont il parle, ce hérault (je n'ai pas dit héros) d'une musique qui EST émotion et aspire à l'universalité. Il est noir, fils ainé d'un pasteur connu pour ses excentricités (celui-ci se déguisait en femme la nuit) et se fait remarquer, comme Sam Cooke avant lui, en chantant à l'église. Il fait ses débuts sous l'égide de la Motown, grande maison de disque et temple de la Soul, regroupant la crème des crèmes dans ce genre. Il se découvre des affinités en duo avec Tammi Terrell, qui sera son âme soeur inavouée. S'ensuit tragédie et excès, et surtout un album-concept d'une rare acuité: What's Going On. Son message, le message de l'album, c'est qu'il est inutile de propager le Mal, d'aller à contre-courant, car c'est avec Dieu qu'il faut compter et Dieu ne veut pas ça. Dieu est notre plus grande force. Le message vaut pour ce qu'il révèle (implicitement): Marvin Gaye se repent de ses propres écarts de conduite et voit enfin la petite lumière au bout du tunnel. Et l'album est magnifique de bout en bout. Gaye est particulièrement convaincant dans son oraison sur la nécessité de "sauver les enfants" sur "Save The Children". Il brille tout autant sur "Inner City Blues" et la chanson-titre. Malheureusement pour lui mais heureusement pour sa réputation de chanteur sulfureux, il retombera dans ses vieux travers et livrera quelques pépites sur des albums de moindre facture. Ainsi, "Let's Get It On" et "Sexual Healing". Il finira tué d'une balle de revolver par son propre père dans des circonstances troubles. Mais son aura nous illumine toujours, à travers ses chansons, et parmi elles "What's Going On".

Et on y retourne...

Parce que comme la confiture ("jam" en anglais) on ne s'en lasse pas, je vous invite à satisfaire ce besoin compulsif d'écouter de la bonne musique. Sans trêve, un nouveau morceau des Jam: "Town Called Malice".

That's Entertainment

The Jam: pas un groupe de midinettes. Issu du punk, mais fusionnant celui-ci avec des influences Rhythm n' Blues, son leader et guitariste/chanteur Paul Weller sait refléter dans ses chansons la frustration et l'inconfort de sa génération et trouvera un écho très favorable en Angleterre. On retrouve au niveau du style et de l'irrévérence les Who (celui des débuts). A écouter: la reprise "David Watts" (à l'origine provenant des Kinks) et ""A" Bomb In Wardour Street".